Le H.I.I.T. (High intensity interval training ou Entraînement par intervalles à haute intensité) est une approche qui est très utilisée dans le domaine de la remise en forme. Beaucoup de coachs la font pratiquer à leurs élèves.

L'avantage supposé, c'est que ça permettrait de développer les capacités tant anaérobies qu'aérobies en même temps.

Ca permet ainsi de ne pas aller courir pendant des heures et des heures, puisqu'en un temps très limité, on a déjà développé notre endurance aérobie. 

Mais est-ce vraiment efficace ? Est-ce vraiment la bonne approche pour quelqu'un qui cherche à regagner la forme ?

J'étais ce jour-là à la salle de sport, en train de faire ma session de force avec des barres olympique. Privilégiant le développement de la force maximale, j'avais des périodes de repos assez longues. Cela m'a laissé tout le loisir d'apercevoir les coachs de la salle et comment ils entraînaient leurs clients.

Une grande partie d'entre eux leur faisaient faire une forme de H.I.I.T, soit en format H.I.I.T. pur (alternance de périodes de travail et de repos) ou alors sous forme de circuit.

Dans les deux cas, l'intention est la même : condenser au maximum la session tout en ayant de la haute intensité qui va bousculer le corps. Tout cela permettrait d'avoir une session non seulement très efficace, mais en plus très efficiente, puisque condensée au maximum.

Le H.I.I.T. tel qu'observé dans les salles de sport

Attachons-nous d'abord à décrire ces H.I.I.T. que j'ai typiquement observés en salle. Mon propos n'est pas de critiquer le H.I.I.T. dans l'absolu, mais bien de décrire et commenter l'interprétation qui en est faire par de (trop) nombreux entraîneurs.

L'idée de base est de répéter un exercice à haute intensité, qui va générer de la puissance, utiliser beaucoup d'énergie, sur toute une série d'intervalles.

Deux formes fréquentes

Le H.I.I.T. dans sa forme la plus stricte, c'est la répétition d'un exercice en suivant des intervalles précis. Le nombre et la durée des intervalles sont clairement déterminés. On pratique l'exercice générateur de puissance, puis on récupère (activement, en général), et on recommence le cycle.

Certains l'adaptent sous une forme de circuit. Les intervalles sont toujours là, mais la période de repos est remplacée par un autre exercice. L'intervalle n'est plus là pour indiquer la nature de l'activité (exercice ou récupération), mais l'exercice réalisé. Dans cette dernière forme, il peut toutefois y avoir une période de repos pendant l'intervalle de chaque exercice.

L'intervalle de travail, à quoi ça ressemble ?

Prenons un exercice type pour une session de H.I.I.T. : le swing avec kettlebell.

Pour ceux qui ne connaissent pas, le swing consiste à attraper un kettlebell (avec une ou deux mains), le balancer vers l'arrière en fléchissant les hanches, puis le balancer vers l'avant du fait de l'extension dynamique et puissante des hanches.

Si le swing est bien réalisé, le kettlebell va flotter devant, puis redescendre. Flexion, extension des hanches.

Bien réalisé, c'est un mouvement qui génère énormément de puissance. Celle-ci, mesurée à l'aide de plaques de force, rivalise avec celle des mouvements d'haltérophilies.

On est bien au top de ce qu'on peut faire pour générer de la puissance avec un exercice qui, bien coaché, s'apprend assez bien. Beaucoup plus facilement que l'arraché de l'haltérophilie en tout cas !

C'est donc un très bon candidat pour du H.I.I.T. car il permet vraiment la haute intensité.

Que l'entraîneur ait choisi un H.I.I.T. en circuit ou sa forme stricte, à quoi ressemble les swings de son client ?

Je serai généreux et considèrerai le cas d'un client qui sait réaliser un beau swing, avec une belle extension de hanche, puissante.

La première série est belle et puissante.

Dans la version stricte, le client se repose un peu, activement en marchant, puis reprend des swings.

Deux, peut-être trois séries, tout va bien.

Puis il commence à fatiguer.

Et c'est là qu'arrive les soucis.

H.I.IT. ou L.I.I.T. ? Haute ou basse intensité ?

Avec des intervalles qui favorisent la période de travail à la période de repos, la fatigue s'accumule vite.

En fait je pourrais rentrer dans les détails des systèmes énergétiques, mais cela nous entrainerait loin. Ce sera l'objet d'un autre article.

Ici, disons simplement qu'entre la durée des intervalles de travail (souvent supérieures à 20 secondes) et des périodes de repos (très courtes), le corps puise son énergie principalement avec la glycolise anaérobie. Cela génère cette sensation de brûlure dans les muscles, faussement associée à l'efficacité de l'entraînement. Le problème, c'est que l'efficacité musculaire diminue rapidement, il est impossible de maintenir de la haute intensité.

De plus, sachant ce qui l'attend, le corps (que vous le vouliez ou non), va s'économiser. Dès le premier intervalle, nous ne sommes pas en haute intensité, mais en intensité moyenne. Et très rapidement, cela devient de la basse intensité, parce que physiquement, le corps ne peut pas maintenir une haute intensité pendant des intervalles trop longs et trop rapprochés.

Ce n'est pas du H.I.I.T. mais du L.I.I.T. - Low intensity interval training, entraînement par intervalles à faible intensité.

La sécurité du L.I.I.T.

L'épuisement, tant cardio-vasculaire que musculaire, ça présente immédiatement un gros inconvénient, quand nous sommes sur des mouvements dynamiques et (théoriquement) explosifs.

Plus la fatigue s'accumule, plus il est difficile de garder une bonne forme de mouvement.

Dans le cadre d'une session purement en endurance ou en force, la perte d'une forme correcte est toujours un problème, mais pas très grave. Dans le cas de l'endurance, l'intensité est faible, donc on peut facilement identifier cette baisse de qualité du mouvement et s'arrêter. En force, le mouvement est relativement lent. La perte de forme est ressentie par le pratiquant et il a, normalement, appris comment arrêter le mouvement en toute sécurité.

Mais dans le cas de la haute intensité, de la puissance, où on cherche à être explosif, c'est une autre histoire.

Prenons le cas d'un swing. On va observer un mouvement de moins en moins puissant au fil des répétitions et des séries. Au lieu d'avoir une extension de hanche explosives et dynamiques, on va avoir un mouvement de pendule, de plus en plus mou. On est loin de la haute intensité.

La forme va se dégrader. Le dos va commencer à s'arrondir lors du retour en flexion de hanche. Lors de l'extension, ce sont de plus en plus les bras qui vont tirer le kettlebell, avec une probable hypertension lombaire, sous une charge dynamique. Le risque de blessure augmente.

On le voit, le L.I.I.T. pose déjà un problème pour la sécurité de l'entraînement.

En plus d'être épuisantes physiquement et moralement, ces sessions de L.I.I.T. augmentent les risques de blessures.

Comment pratiquer le H.I.I.T. ?

Mais alors, que faire ? Comment pratiquer le H.I.I.T. pour obtenir ses bénéfices ? Si nous pratiquons une forme de H.I.I.T. c'est parce que nous recherchons un entraînement :

  • sur : nous devons minimiser les risques de blessure,
  • efficient : il ne doit pas prendre trop de temps, ramené à la semaine,
  • efficace : il entraîne le système aérobie (endurance de longue durée) et anaérobie alactique (capacité à générer de la puissance).

Tu noteras que je ne place pas la sensation d'épuisement parmi les bénéfices. Programmer un entraînement épuisant est facile : il suffit de faire du L.I.I.T. Le but du H.I..IT. est une adaptation physiologique, pas l'épuisement.

Avant l'intervalle, la haute intensité

En fait, le H.I.I.T. devient L.I.I.T. parce qu'on se focalise sur l'intervalle.

Mais l'intervalle est secondaire. Ce qui compte, c'est la haute intensité.

Pour en revenir aux systèmes énergétiques, pour générer un maximum de puissance, il faut utiliser l'énergie au plus vite. En premier, le corps utilise l'ATP, des molécules énergétiques disponibles, en réserve dans la cellule. Cependant, les réserves d'ATP sont brûlées en un clin d'oeil et il ne reste que de l'ADP inutilisable. Cet ATP doit être renouvelé, et c'est là qu'interviennent les systèmes énergétiques. Le corps repose donc principalement sur un système énergétique extrêmement rapide pour renouveler quasi-immédiatement les réserves d'ATP : c'est le système anaérobie alactique. Des molécules de créatine phosphate (CrP) se recombinent avec l'ADP pour recréer de l'ATP, qui peut alors être utilisées pour une énergie rapide.

Toutefois, les réserves de CrP sont épuisées en une dizaine de secondes. De fait, il est impossible de maintenir une vraie haute intensité au-delà.

La génération de puissance

Donc, lors d'une session, si nous prolongeons les parties intensives au-delà de cette dizaine de secondes (à plus ou moins quelques secondes selon les personnes), nous n'avons plus de créatine phosphate et c'est la glycolise anaérobie qui prend le relais. Moins rapide, et donc moins puissante.

Il faut donc se concentrer sur la haute intensité d'abord. Un mouvement aussi puissant que possible, qui va aller puiser dans les réserves d'ATP et de CrP, et qui va s'arrêter avant que la glycolise anaérobie ne devienne dominante.

De même, même si nous ne prolongeons pas l'intervalle, mais que le repos est trop court, les réserves de'ATP et de CrP n'ont pas le temps de se reconstituer. Nous sommes bloqués en moyenne ou basse intensité...

Nos systèmes énergétiques ne nous permettent tout simplement pas de générer un maximum de puissance en continu.

On voit donc là la pertinence d'un entraînement par intervalle, de façon à pouvoir générer cette puissance maximale de manière répétée. Mais l'arbre de l'intervalle ne doit pas nous cacher la forêt de la haute intensité.

Ce qui compte, c'est bien la haute intensité, pas l'intervalle !

La récupération : reconstituer les réserves

Pour pouvoir répéter un intervalle avec un maximum de puissance, il faut avoir suffisamment récupéré pour pouvoir générer cette puissance.

En pratique, cela signifie avoir reconstitué des réserves d'ATP et de CrP suffisantes pour pouvoir de nouveau utiliser le système anaérobie alactique.

Bonne nouvelle, pour cela, nous avons un autre système énergétique. C'est un système lent mais très efficace : le système aérobie (ou phosphorylation oxydative). La partie récupération de l'intervalle sert à cela : reconstituer les réserves d'ATP à l'aide de notre système aérobie ! 

Et là, évidemment, même si le H.I.I.T. en lui-même entraîne notre système énergétique aérobie à être plus efficace, c'est beaucoup mieux d'avoir, au départ, un système aérobie déjà efficace. Cela nous permet de récupérer plus vite, et donc d'avoir des intervalles plus courts, donc plus de répétitions puissantes sur la session.

Le H.I.R.T. - Entraînement à haute intensité répété

Dans un premier temps, la solution est plus simple qu'il n'y parait.

Il faut oublier l'intervalle figé et se concentrer sur la répétition de la haute intensité.

Le H.I.I.T devient du H.I.R.T. High intensity REPEAT training. On se concentre sur la répétition de la haute intensité plutôt que l'intervalle pré-défini.

En pratique, nous programmons un exercice qui nous permet d'exprimer de la puissance. Des swings, des snatchs, par exemple. Mais tout ce qui va puiser dans le système énergétique anaérobie alactique est bon : des sprints, des pompes ou des squats explosifs...

L'effort est court. Quelques secondes. C'est facile à évaluer : dès que la puissance de la série commence à diminuer, il faut stopper. En fait, il faut même stopper avant que cette puissance ne diminue. Cela indique que le système énergétique majoritaire est encore le système de la puissance, le système anaérobie alactique, et pas encore celui de la glycolise anaérobie.

La récupération n'est pas quantifiée précisément. Elle doit permettre au corps de reconstituer les réserves d'ATP en utilisant le système aérobie. En règle générale, cela demande en général au moins 20 à 60 secondes.

Avec la fatigue accumulée, il faut aussi noter que les intervalles peuvent s'allonger au fur et mesure de la session.

Le plus simple : E.M.O.M.

E.M.O.M. est un sigle pour Every minute on the minute, ou à Chaque minute au départ de la minute.

Si tu es quand même attaché à une session structurée, avec des intervalles clairs, c'est une solution simple. On garde des intervalles d'une minute. Pour peu que la charge de l'exercice soit bien adaptée et en limitant les répétitions autour de 5, on devrait s'en tenir à moins de 10 secondes d'effort, ce qui laisse près de 50 secondes de récupération.

On pratique ainsi un H.I.I.T. avec des intervalles fixes, tout en permettant à la fois la puissance et une récupération suffisante pour répéter cette puissance.

En effet, le H.I.I.T. n'est pas mauvais en soi. C'est la manière dont il est souvent mis en oeuvre qui est mauvaise. Le but de la session de H.I.I.T n'est pas d'être de plus en plus épuisé.

Le but est de pouvoir faire un maximum de répétitions puissantes, grâce à des intervalles suffisamment courts pour permettre l'explosivité et des périodes de récupération suffisantes pour permettre la répétition de cette puissance.

Des pré-réquis pour un entraînement H.I.I.T. efficace

La prochaine fois que tu auras l'intention de faire ce type d'entraînement, sache qu'il y a un certain nombre de pré-requis.

Pouvoir générer de la puissance

Premièrement, pour pouvoir générer de la puissance, il faut de la force. La puissance n'est en effet que de la force exprimée rapidement.

Donc si tu n'as pas déjà développé un minimum de force, oublie tous les protocoles de forme H.I.I.T. Tu ne pourras pas générer la puissance nécessaire pour en avoir les bénéfices. Tu ne feras qu'augmenter le risque de blessure.

Commence donc par un entraînement en force avant de songer à des sessions de H.I.I.T.

Pouvoir récupérer aérobiquement

Deuxièmement, et c'est un point qui est souvent oublié, c'est que la récupération est aérobie.

Pour une récupération efficace, il faut un système aérobie efficace. Il ne se développera que marginalement avec le H.I.I.T. si'l n'a pas déjà une bonne base.

Pour cela, il n'y a pas de raccourci : il faut des entraînements à basse intensité, relativement constants sur la durée. Si tu n'aimes pas courir, une bonne solution alternative est tout simplement la marche !

Marche tous les jours, beaucoup, tout le temps, dès que tu en as l'occasion, ce sera la meilleure manière d'avoir un entraînement aérobie efficace, qui te donnera une bonne fondation.

Ainsi armé d'une force permettant d'exprimer de la puissance et d'une capacité aérobie te permettant de récupérer vite, tu seras prêt à aller pratiquer de vraies sessions H.I.I.T. et pas du L.I.I.T.

  • François Monluçon dit :

    Enfin quelqu’un qui dit la vérité sur le HIIT. Je suis bien d’accord avec toi : la plupart des entraînements qui sont proposés comme du HIIT n’en sont pas. J’entends même des gens qui parlent régulièrement de sprint comme activité possible au format HIIT. On peut s’en rapprocher sur vélo d’intérieur (sport où le poids du corps est porté) avec des protocoles 20/10 de type Tabata, mais même là, on n’atteind pas sa puissance maximale de sprint : on s’en approche seulement. Quant au sprint en course à pied, où on doit déplacer toute sa masse corporelle à vitesse maximale, c’est impossible d’adopter un format HIIT. Il n’y a qu’à aller voir les barèmes de récupération dans les clubs d’athlétisme : pour du sprint répété, où on cherche la puissance maximale sur chaque sprint, il faut compter 1 minute de récupération par 10 mètres parcourus. Exemple : 50 m de sprint = 5 minutes de récup.Ou bien il n’y a qu’à regarder les sprinters de très haut niveau pendant plusieurs minutes après la course pour constater leur essoufflement. On peut appliquer cela à tous les sports : jamais un boxeur n’envoie un déluge de coups à pleine puissance pendant 20 secondes d’affilée en combat!

    • Oui, en sprint, c’est difficile. On peut en théorie faire du HIIT, mais le sprint est forcément très court, car seule la période d’accélération est à puissance max, et au-delà de 30 mètres, on n’accélère plus. Une alternative, c’est du sprint en côte.
      Dans les études de puissance répétée avec des sprinteurs, les sprint étaient de 5 à 10 secondes et les périodes de repos de 5 minutes au moins !

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    About the author 

    Jean-Francois Lopez

    Jean-François "jef" Lopez accompagne depuis 2016 des cadres et dirigeants occupés sur le chemin de la forme durable.
    Ancien sportif autour de la vingtaine, devenu gros, faible et complètement hors de forme autour de la trentaine, Jean-François a décidé de réagir et de retrouver la forme.
    Lors de cette quête, il a été amené à changer son approche de la remise en forme.
    De nombreuses rencontres avec les meilleurs instructeurs de la planète, dont Pavel Tsatsouline, l'ont en effet convaincu que le paradigme de la souffrance et de l'effort démesuré n'était pas le plus adapté pour durer. C'est comme cela qu'est né le concept de "forme durable".
    En plus de son expérience personnelle, Il se forme continuellement, et est ainsi devenu instructeur certifié StrongFirst Elite (SFG2, SFB, SFL), spécialiste du mouvement fonctionnel et de la souplesse (FMS2, FCS, YBT, Flexible steel niveau 2), expert en respiration (instructeur avancé Oxygen advantage, praticien Buteyko) et coach en nutrition (PN).
    Il est également détenteur d'une certification d'entraîneur personnel (ACE-PT, accrédité par la NCCA) et inscrit au registre européen des professionnels du sport EREPS.

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